Avant même que je tombe enceinte lors de ma formation aux techniques de négociation et de médiation, je choisissais le sujet de la maïeutique ou l’art d’accoucher les esprits comme objet de mon mémoire… coïncidence ? La directrice de la formation ne répondra pas à cette « question »… Mais, une chose est sûre on ne vient pas à cette formation par hasard !

La comparaison est facile… La maïeutique ou l’art de faire accoucher les esprits est directement inspirée de l’accouchement physiologique d’un enfant. Socrate a pour mère une sage-femme. Le parallèle est pour lui évident, pour moi, il reste en construction. Alors pourquoi ne pas revenir aux étapes de l’accouchement pour trouver les étapes de la mise en conscience des médiés ? Existe-t-il un processus commun à l’accouchement physiologique et à l’accouchement de l’esprit ?

On peut communément lire que l’accouchement se décompose en trois étapes* :

1-      Dans un premier temps, les contractions vont préparer le col de l’utérus à la naissance ; il s’agit de la dilatation du col.

La première phase de l’accouchement, la plus longue, correspond à la phase de dilatation du col de l’utérus, sous l’action des contractions utérines, véritable « moteur » du travail. Les contractions vont agir sur le col selon trois mécanismes :

Cette phase de dilatation se décompose, elle-même, en 3 étapes :

  • la phase de latence est la phase de mise en route du travail. Les contractions sont d’abord irrégulières et peu douloureuses, puis se rythment et gagnent en intensité. Ces contractions permettent au col de ramollir, raccourcir puis de s’ouvrir jusqu’à 3-4 cm. Cette phase de latence peut durer quelques heures ; elle est généralement plus longue chez la femme accouchant pour la première fois.
  • la phase active. Les contractions sont plus rapprochées, plus longues et plus douloureuses. Cette intensification du travail va permettre au col d’arriver à dilatation (7-8). C’est durant cette phase que peut-être posée la péridurale si la future maman le souhaite.
  • la phase de décélération. Parfois appelée « phase de désespérance », cette phase est la plus courte mais la plus difficile car les contractions laissent peu de répit à la maman. Le col arrive à dilatation complète et le bébé entame sa descente.

En salle de travail, la sage-femme pratique régulièrement un toucher vaginal afin de contrôler l’évolution du col. Le bien-être fœtal est également contrôlé de façon continue grâce au monitoring.

2-      La seconde étape du travail va permettre de pousser pour expulser le bébé.

Poussé vers le bas par les contractions, le bébé descend dans le bassin, un « tuyau » de forme coudée et de différents périmètres. Pour franchir ces différents passages, le bébé va devoir adapter sa position tandis que les os du bassin de la femme vont devoir aussi bouger et s’écarter grâce à l’hyperlaxité ligamentaire due aux hormones. Selon les femmes, cette phase de descente peut débuter pendant la dilatation ou à dilatation complète.

La descente du bébé dans le bassin suit différentes étapes :

  • phase d’engagement : le bébé franchit le détroit supérieur du bassin. Pour franchir ce passage en forme de coeur, il doit se placer en diagonal afin de bénéficier du plus grand diamètre.
  • phase de descente : le bébé descend dans le détroit moyen en se remettant droit, dos en avant, tête fléchie menton contre la poitrine afin de présenter la partie la plus étroite de son crâne et passer l’obstacle des épines sciatiques. Dans le même temps, il effectue une rotation.
  • phase de dégagement : le bébé franchit le détroit inférieur du bassin (orifice inférieur du bassin).

La descente du bébé dans le bassin peut durer de 30 à 40 mn à quelques heures dans les cas accouchements les plus difficiles et en fonction de la présentation du bébé et de la position de la maman. Plus elle reste mobile et adapte sa position, notamment en termes de fermeture ou d’ouverture des genoux, plus cette phase d’engagement est facilitée.

Une fois arrivé au niveau du détroit moyen, le bébé commence à pousser sur le périnée, déclenchant alors chez la maman le réflexe de poussée. Il atteint ensuite le détroit inférieur, et se dirige vers la vulve, tête relevée. Dernier obstacle avant sa sortie : le périnée. Aidé par les poussées de la maman sur les contractions, la tête du bébé va étirer ce faisceau de muscles pour franchir la vulve. Lorsque la tête du bébé est enserrée par cet anneau musculaire, la future maman doit arrêter de pousser afin de ne pas brusquer la sortie du bébé et éviter une déchirure du périnée. Millimètre par millimètre, le gynécologue ou la sage-femme guide la sortie de la tête, puis une fois celle-ci dégagée, la dirige vers le bas pour libérer une épaule, puis vers le haut pour dégager l’autre épaule. Le reste du corps suit ensuite très vite.

3-      La troisième étape, la délivrance, est l’expulsion du placenta.

Cette dernière étape de l’accouchement correspond à l’expulsion du placenta, des membranes et du cordon ombilical, 15 à 20 minutes après la naissance. Elle se déroule en trois étapes :

  • le décollement du placenta : sous l’effet des contractions, le muscle utérin se rétracte, entraînant le décollement du placenta.
  • l’expulsion : le placenta est expulsé, aidé par une ou deux poussées de la maman et par la pression de la main de la sage-femme sur le fond utérin. La sage-femme vérifie ensuite que le placenta, les membranes et le cordon sont complets.
  • l’hémostase : tous les vaisseaux utéro-placentaires qui nourrissaient jusqu’alors le placenta saignent mais en se contractant, l’utérus resserre ces vaisseaux et les saignements finissent pas diminuer. Cette étape est surveillée de près par la sage-femme afin de détecter tout début d’hémorragie de la délivrance, une complication grave de l’accouchement. C’est pour prévenir ce risque que la femme est systématiquement gardée deux heures en salle de naissance après l’accouchement.

Si le placenta n’est pas complet ou si les saignements sont anormalement importants, une révision utérine est réalisée. Ce geste consiste à introduire une main dans l’utérus afin de vérifier qu’il ne reste aucun fragment de placenta ou membranes.

Si on applique à la médiation ce qui précède, l’on pourrait envisager que :

– la phase 1, les contractions et la dilatation du col, corresponde à la phase du « quoi ». Ca fait mal, c’est le feu, les médiés déversent leurs émotions, leur histoire. Ils sont submergés par ce qu’ils ressentent. Cette souffrance leur permet d’accéder à la phase 2.

– La phase 2, l’expulsion de bébé, coïncide avec la phase du « pourquoi ». Dans cette phase, le médié expulse ses émotions pour prendre conscience de ses besoins.

– La troisième phase, la délivrance, concorde avec le « comment » et « le comment finalement ». En effet, dans la phase créative, les médiés se libèrent de leurs chaines, ou plutôt, de leur mécanisme initial de pensée. Ils conçoivent alors des solutions basées sur leurs besoins qui correspondent exactement à leurs manques.

En définitive, il apparaît que l’accouchement physiologique dessine les étapes du processus de la médiation. Ce qui fait dire que la maïeutique ou l’art du questionnement participe nécessairement de l’accouchement de l’esprit mais, plus encore, il semblerait, qu’appliquée à la médiation, c’est l’ensemble du processus qui relève de l’accouchement de l’esprit des médiés voire de leur renaissance.

Si le questionnement participe de façon évidente à la mise en conscience des médiés, d’autres techniques s’avèrent non moins efficaces. Mon ambition est alors de vous familiariser avec ces différents outils qui vous permettront d’accompagner vos clients au plus près de leurs besoins que vous soyez avocat accompagnateur lors d’une médiation ou que vous souhaitiez mettre en place une procédure participative.

*Les étapes scientifiques de l’accouchement physiologique sont décrites dans la fiche : https://www.passeportsante.net/fr/grossesse/Fiche.aspx?doc=etapes-accouchement

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